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La vraie représentation

        de Jésus Christ

Témoignage de mon père


                  ''Lorsque je regarde en arrière, tout cela ressemble à un vieux film.

       J'ai tenté d'examiner nouvellement ces évènements qui me quittaient peu à peu,

   mais en dehors d'une frustration déjà pesante, aucun apaisement ne m'est parvenu.''
 

 
Juillet 1928
 
 - Ma Rencontre avec le père -
 
Sur la petite place proche de notre maison, se réunissaient quotidiennement des enfants. Je les connaissais assez pour savoir que la douceur n'était pas leur qualité première. Alors que je les observais, une colombe se posa avec difficulté au milieu d’eux. Agités, il ne faisait aucun doute qu’ils s'apprêtaient à la blesser. Afin de la saisir je me précipitai vers elle en haussant le ton pour me frayer un chemin. Une de ses ailes semblait pencher plus que l'autre. Je commençai à la masser entre la poitrine et l'épaule, mais dû m'en séparer rapidement par crainte qu’ils me l’enlèvent. Je la lançai fortement vers le ciel et fièrement lui fis reprendre sa liberté.
 
Le nouveau père de notre église qui se tenait proche et avait observé la scène intrigué, me sourit et agréât d’un mouvement de la tête. Il s'approcha pour me parler puis me posa quelques questions. Comme nous n'allions que très rarement à l'église il me proposa d'y venir avec mes parents. De son accueil et nos appréciations, j’y retournais par périodes pour aider à diverses tâches en évitant les messes qui m’ennuyaient plus que tout. Dans la grandeur architecturale de ce milieu qui m’impressionnait tout autant que ses nombreux détails, ce qui m’intéressait c’était de pouvoir faire sonner la cloche. D’essayer à quelques trop rares occasions le somptueux orgue liturgique sous la vigilance du père lorsque nous étions seuls et d’apprécier entre autre les divers goûters. Le père n’était pas dupe, cependant il m’affectionnait. Pour lui, toute personne humble, reconnaissante et endurante au quotidien, pouvait faire évoluer sa foi en dehors de la religion. Mais une présence commune au sein de l’église était recommandée. Il savait parler sans blesser. Rien de sa bouche ou de sa gestuelle ne laissait présumer de mauvais jugements de sa part.
 
 
 
 
Août 1934
 
- Réception du portrait -
 
En revenant du cimetière un jour d’été, le père m'appris qu'il devait partir plus tôt que prévu pour une mission en Chine dont la durée était indéterminée. Il me remercia de façon singulière pour les tâches que j'avais accomplies à ses côtés. Arrivés à l'église, il m'annonça alors qu'il souhaitait porter à ma connaissance une information importante et que si j'entendais celle-ci, qu'il serait souhaitable également que j'accepte alors une dernière tâche et responsabilité de sa part. Je pensais qu’il faisait allusion à l’église. Nos rencontres devenant plus rares, prêt à rendre compte de mon amitié je répondis par la positive.
 
Il me demandât de m'asseoir et me fixa des yeux quelques instants. Sortant un élément du confessionnal, il en déplia le drap et m’enseigna la peinture d'un portrait d'homme. Puis me demanda si j'avais une quelconque idée à propos de la représentation de celui-ci ? Pour ma part, le visage de Jésus m'apparut très vite comme évident. Sauf que, celle-ci n'était pas une représentation quelconque. Je fus très surpris d'apprendre qu’en fait, il s’agissait de sa représentation véridique, celle de Yeshua, Jésus Christ de Nazareth tel qu'il fût. Portrait, selon le père, peint à son origine par un chypriote romain, copié plus tard par Saint Luc, disciple de l'apôtre Paul et retransmis par d'autres durant plusieurs siècles. Un concile ayant été dès le 15ème siècle en possession d’une copie qui était détenue par un séfarade du nord de la péninsule Ibérique. Le maintien du secret étant depuis lors bien gardé par quelques hauts responsables du Vatican.
 
Le père leva les yeux vers la croix et dît : "Par une poignée d'intègres et leur levain, du silence il retentira."
 
Il m'expliquât que ce portrait qu'il avait fait dupliquer en Italie était une des rares vraies représentations existantes. Que pour quelques raisons obscures celles connues n'étaient volontairement pas les vraies. Je m’étais effectivement déjà posé la question de savoir si Jésus avait été tel que représenté dans l’église. Il laissa transparaître un voile de contrariétés concernant de nombreuses réformes au sein du Vatican. Il fallait plus que jamais, qu'en dehors du portrait qu'il détenait, d'autres personnes puissent en conserver copie. Aussi devais-je consciencieusement le cacher jusqu'au jour où il me serait possible de le faire à mon tour dupliquer le plus fidèlement possible pour en donner copie à une personne de confiance, hors famille ou religieux représentant l’église et pas avant mes 30 ans.
Il me demanda de n'en parler à personne tout comme de taire son nom, d'en faire secret absolu. Malgré ma volonté de le suivre dans ses intentions et de répondre à ses attentes, un doute subsistât un instant, tout quant à la légitimité des autorités de l’église. Aussi, étais-je perplexe et trouvais la responsabilité un peu lourde pour mon âge et mes faibles moyens. Mais je connaissais le père érudit et sage. Homme de convictions animé par les raisonnements tangibles et véridiques, qui avait de plus toujours été bon envers moi. Je finis alors par prendre conscience tant de l'importance de ses catégoriques affirmations que de sa très sérieuse demande. De ces explications qui me projetèrent dans un autre monde, j'eus quelques questions auxquelles il me proposa pour la bonne compréhension, d'y répondre avec un peu plus de temps à un autre moment. Cela nécessitait vraisemblablement des connaissances préalables, propres aux clergés et à l'histoire, que je n'avais pas. Mais cela ne se fit jamais car le père partit en silence et un autre le remplaça. Sans éclaircissements, je dus me contenter de ces informations partielles. Quelques années plus tard, ce fut la rencontre d'un artiste espagnol qui me permit de concrétiser l'acquisition d'une nouvelle et fidèle copie.
 
 
 
 
Mai 1944
 
- Transmission du portrait -
 
Dans l’année de mes 30 ans, ayant du mal à dissimuler ma propre copie, je saisis l'occasion de m'acquitter de ma promesse. Celle-ci me tenaillait et les circonstances de la vie étaient bien incertaines avec la guerre qui s’éternisait. Dans mon entourage, les gens de confiance n'étaient pas nombreux. Je n'avais en vue pour ma tâche de transmission du portrait qu'un voisin. Il était veuf, plus âgé mais lettré, avec lequel je m’étais lié d'amitié par l'échange réciproque de services quotidiens et en qui je vouais une certaine confiance. Ce personnage de caractère, tout comme moi croyant non pratiquant, qui parfois rouspétait des injustices, semblait indiqué. Il acceptait souvent de donner à ceux qui étaient dans le besoin mais remplis de fausses promesses de remboursement, le produit de ses cultures qu’il était censé vendre.
 
Nous questionnant un soir devant sa grange à propos de la guerre en cours et des évènements de pillages allemands, j'avais le portrait avec moi pour le lui donner. Je n'étais pas sûr de pouvoir lui expliquer les choses à la façon du père car je n'avais ni son assurance, ni ses connaissances pour répondre à d’éventuelles questions. De plus, alors que je saisis l'occasion de lui en parler, la poissonnière passa et nous interrompit, ce qui m’embarrassa dans mon élan. Une fois partie, je repris pensant qu'il allait trouver cette démarche douteuse. Tout cela ne venait pas très à propos et je n'étais plus très convaincu ni du moment ni de la personne. Lui enseignant le portrait, ma confiance revînt lorsque qu’il eût reconnu Jésus par lui-même. Sans pour autant avoir employé les mots du père, je lui fis part de la démarche secrète tout comme il m'avait été demandé de le faire. D'un regard légèrement incrédule mais touché de mon geste, il me remercia et prit le portrait sans questionnements, plutôt à la façon d'un cadeau qu’avec l’importance que j’attendais. J'étais un peu déçu de mon empressement. Sa sensibilité n'était pas la mienne et je ne pense pas qu'il en ait eu la même conscience. Tout cela était peut-être un peu léger pour un homme de labeur, mais l'acte était posé et les principales informations données.
 
 
 
 
Décembre 1968
 
 - Le manquement -
 
Le portrait acquis du père dont j’avais déjà remis en question la nécessité d’être caché, pourtant protégé et rangé à l’abri des regards. Si bien conservé durant tant d'années à je ne sais quelle fin d’utilité, fût réduit en cendres dans l'incendie de mon grenier.
 
 
 
 
Septembre 1979
 
- Les retrouvailles -
 
Les années avaient terni mes souvenirs et le monde et ses mœurs d’autant plus changé l'aspect de notre individualité. Je ne m’intéressais plus qu’à l’essentiel mais ressassais encore la perte du portrait. De cette angoisse latente, une surprise m'attendait encore. Sorti de la gare du nord, je tombais nez à nez avec la fille de mon voisin, aussi joviale et amicale qu’autrefois. Elle fût tout aussi surprise et contente que moi. Avec son mari, ils étaient installés à Paris. Je pris des nouvelles de sa famille. Son père avait fini ses jours dans un asile pour personnes âgées six ans plus tôt. Son époux me proposa de fuir l’agitation des vendeurs ambulants en les accompagnants à deux pas pour prendre un café et discuter de tout cela dans leur demeure. Me parlant de la petite aide qu’elle reçut par héritage, je fis mine pour en savoir d'avantage à propos de la toile, de me souvenir d'un beau portrait de Jésus. Elle m'en parla d'un air interrogatif ayant cerné ma curiosité à ce sujet. Etonnée de ce que je pouvais en savoir, elle me questionna. J’évoquais alors quelques mots touchés de son père à propos de l’importance de ce portrait, puis elle se livra. Lorsqu’elle découvrit cette toile mal conservée avant que son père ne parte pour l’asile. Celle-ci avait subi des dégâts et était déchirée. Son père n'avait plus tous ses esprits mais ce qu'il lui avait donné comme informations concordait pour le peu. Sans beaucoup de précautions quant à l’état du portrait, il ne le lui avait pourtant jamais exposé au préalable, ni parlé de mon implication. Par foi et ce qu’elle en connaissait de son secret, elle eut pris la peine avant de la jetée d'en demander une copie en teinte d’aquarelle, moins onéreuse qu’une peinture à l’huile et magnifiquement exécutée chez un artisan étranger. Ce dernier ayant aussi reconnu Jésus et trouvé son portrait mystique. En dépit de ce qu’il allait se produire, elle eut la bonne idée de photographier celle-ci qui n’avait rien perdu de mon originale. Car comme pour respecter la nécessité constante de difficultés liées à la garde de ce portrait, cette aquarelle ne put hélasse jamais être conservée par ses soins. Son précédent conjoint ayant déboursé pour sa réplication, l’avait naturellement emportée au moment de leur séparation pour retourner dans son pays d'origine au Luxembourg. De cette mésaventure je pus du moins récupérer copie de la photo comme maigre consolation et souvenir.
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17 Novembre 1991
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Aujourd’hui les mêmes questions hantent mon esprit et restent sans réponses. Qu'était devenu notre père pour lequel nous n'eûmes jamais obtentu aucune nouvelle ? Quel était le souci du Vatican avec ce portrait ? Quel aurait été l'implication d’en monter la vraie représentation ? Et à quel moment était-elle destinée à faire surface ? Plus avisé à mon âge et le père probablement décédé, je n’aurais pas cherché à en cacher l’existence. Mais en dehors de quelques envois de courriers anonymes et quelques autres idées plus journalistiques irréalisées, étant un homme de fonction publique et ayant une famille, je dois me prémunir d’esclandres à propos d’un sujet somme toute complexe et pour lequel je ne possède pas beaucoup plus à présent qu’une simple photo.
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